L’interprétariat communautaire: la promotion porte ses fruits
Nov.. 2010Évaluation d’impact sur la santé
Migration et santé. En matière de santé, il est crucial de comprendre et d’être compris. C’est pourquoi la population allophone a souvent besoin d’interprètes communautaires lors des entretiens de conseil ou de consultations médicales – un service de plus en plus important dans une Suisse multiculturelle. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) s’engage très activement dans ce domaine depuis 2002.
Lorsque la confiance règne et que la patiente ou le patient perçoit toute l’attention des professionnels, il est plus facile de faire de la prévention et de mener un traitement à bien. Pour remplir ces critères, les entretiens de santé conduits avec les migrant-e-s vivant en Suisse doivent souvent être accompagnés par des interprètes communautaires. L’interprétariat communautaire se différencie de l’interprétariat traditionnel en ceci qu’il prend en compte le contexte socioculturel des interlocuteurs et interlocutrices et permet une communication respectueuse des perceptions, des valeurs et des significations différentes.
Les dangers des malentendus
La Suisse compte actuellement quelque 200‘000 personnes allophones, qui ne sont pas en mesure de communiquer dans l’une des langues nationales courantes ni en anglais. Chez les migrant-e-s, qui représentent environ un cinquième de l’ensemble de la population, on trouve en outre un nombre non négligeable de personnes capables, certes, de maîtriser une conversation d’ordre général mais dont le niveau linguistique est insuffisant pour comprendre des explications complexes sur des questions de santé. Cette situation peut avoir des conséquences négatives sur les rapports de confiance, par exemple lors de consultations médicales, entraînant une observance insuffisante du traitement et, finalement, desservant le succès de la thérapie. Au quotidien, les migrant-e-s recourent souvent à leurs proches (parfois aussi à des enfants) ou encore au personnel présent comme interprètes. Étant donné l’absence de compétence, ces solutions improvisées peuvent conduire à des problèmes importants, à des diagnostics erronés ou des traitements incorrects.
650 interprètes dans 50 langues
Les professionnel-le-s et les autorités connaissent le problème depuis longtemps. Pour sa part, l’OFSP encourage l’interprétariat communautaire depuis 2002, époque à laquelle il a lancé le Programme nationale Migration et santé qui a permis de réaliser de nombreux projets. Un centre de compétence a notamment été créé – géré actuellement par l’association INTERPRET – chargé de garantir le management et le développement de la qualité des prestations d’interprétariat communautaire (p. ex. l’accréditation des établissements de formation). Jusqu’ici, 650 personnes ont été certifiées comme interprètes communautaires dans les 50 langues les plus courantes parlées par la population migrante. Ces interprètes communautaires sont soumis-e-s au secret professionnel et sont à même – au contraire des proches qui font spontanément office de traducteurs – de garantir une qualité professionnelle de compréhension lors de consultations médicales ou d’entretiens de conseil. La promotion de la qualité de l’interprétariat communautaire est aussi un but central de la deuxième phase du programme national (2008 – 2013). Un examen professionnel a déjà été créé, débouchant sur un brevet fédéral délivré par l’Office fédéral de la formation et de la technologie.
Des projets variés pour promouvoir l’interprétariat communautaire
Le centre de compétence, mais aussi une série d’autres projets et de publications (voir ci-dessous), ont contribué à la promotion de l’interprétariat communautaire.
– Création du site www.migesplus.ch qui permet à des professionnel-le-s du domaine de la santé d’obtenir des informations sur la santé dans plus de 25 langues afin de les remettre aux migrant-e-s qui viennent les consulter.
– Edition, dans le cadre du projet Migrant Friendly Hospitals, du manuel «Diversité et égalité des chances» qui souligne le besoin d’interprétariat communautaire dans le quotidien hospitalier et émet des recommandations concrètes pour la mise en œuvre.
– Tournage du documentaire «Quand comprendre peut guérir» qui illustre la manière de recourir à l’interprétariat communautaire à l’hôpital.
– Exécution de l’étude juridique «L’interprétation communautaire dans le domaine de la santé et sa prise en charge», qui confirme que personne ne doit renoncer à un traitement médical indiqué au motif que ses connaissances linguistiques sont insuffisantes. De plus, la personne concernée doit pouvoir donner son consentement libre et éclairé sur une intervention à venir dans une langue qu’elle comprend.
– Exécution de l’étude préliminaire «Coûts et utilité de l’interprétariat communautaire dans le domaine de la santé» qui esquisse une argumentation scientifiquement fondée et démontre que l’interprétariat communautaire permet de réduire les évolutions défavorables des pathologies ainsi qu’un surapprovisionnement médical. Les auteur-e-s concluent que le recours à des interprètes communautaires bien formé-e-s revêt un caractère d’investissement. Si le recours génère, il est vrai, des coûts supplémentaires à court terme, ces derniers peuvent être compensés par des économies à long terme dans les domaines de la santé, de l’économie et pour la société.
Bien des choses ont donc déjà été accomplies pour améliorer la compréhension dans le domaine de la santé – il faut désormais encore mieux faire connaître l’offre et l’utiliser.
Une publication résume les résultats de recherche
La publication «Des ponts linguistiques pour guérir. L’interprétariat communautaire dans le domaine de la santé de la Suisse» illustre l’interprétariat communautaire d’un point de vue qualitatif, juridique et économique. Elle résume les découvertes essentielles sur la question et montre dans quel environnement de recherche elle s’intègre. La publication se fonde sur dix rapports d’experts et quelques 60 articles de revues ou de séries publiées jusqu’ici en Suisse sur la question de la compréhension interculturelle dans le domaine de la santé.
La publication paraîtra fin janvier 2011 en allemand et en français et sera disponible sous www.miges.admin.ch
Service national d’interprétariat téléphonique
Si, lorsque la communication est difficile, la présence d’un-e professionnel-le est nécessaire, l’interprétariat téléphonique s’est révélé dans de nombreux cas être un complément approprié et efficace. L’OFSP finance donc la mise en place d’un service national d’interprétariat téléphonique principalement destiné au secteur de la santé (hôpitaux, cliniques et services ambulatoires). Cette prestation viendra compléter l’offre déjà existante en matière d’interprétariat communautaire sur place (face à face).
L’appel d’offres public pour le développement du projet de mise en place d’un service national d’interprétariat téléphonique a déjà eu lieu. L’exécution du mandat a été confiée à AOZ Asylorganisation Zürich Medios. Le service d’interprétariat téléphonique sera opérationnel en janvier 2011.
Plus d’information sous http://www.bag.admin.ch/themen/gesundheitspolitik/07685/12532/index.html?lang=fr
Liens
Contact
Michèle Baehler, Programme national Migration et santé, michele.baehler@bag.admin.ch